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2021

Quelle année ! De la xalps aux championnats du monde en passant par le Brésil et la finale de coupe du monde…  

Depuis 2013 j'ai rêvé de la x-alps, mais sans toutefois être sûre que j'y participerais un jour. Le niveau technique requis, la force mentale nécessaire, l'endurance… Je rêvais d'acquérir tout ça pour m'inscrire à cette course qui, je le sais maintenant, correspond exactement à la pilote, passionnée de grand air et de montagne que je suis. Août 2020, je me sens prête à essayer de réaliser ce rêve, relever ce défi hors norme. Mais avant de l'avoir fait, il était vraiment dur de se faire une idée de quelle performance j'allais pouvoir montrer, si mon genou gauche capricieux me ferait tenir 2 jours ou 2 semaines, si j'allais réussir à bien m'alimenter, si je dormirais assez… Enormément d'inconnues, de questions auxquelles je n'avais pas de réponses qui passaient chaque jours dans mon esprit et cela  depuis la sélection. Je crois que déjà avant de partir, le travail mental que j'ai effectué était énorme. Comme me dis souvent Maman, "you can !". C'est la seule réponse que j'avais et celle en laquelle je voulais croire, pour rester positive et prête. Le jour du départ de la course, je suis tendue, mais pas une tension due à la pression, je suis enfin là, à toucher un rêve, entourée de mon meilleur pote Joël, Michael l'éternel positif, Alex l'inépuisable et mon plus grand fan, Papa.

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Le premier jour n'est pas un test. Ça part à bloc, et très vite je me retrouve dans une  situation inconfortable. Après une première transition au sud du Gaisberg, je suis bas et je bataille pour regagner un peu de hauteur, on est d'entrée dans le vif du sujet. Si je pose ici, je serais dernière et je n'aurais peut être pas la possibilité de revenir avant la première élimination. C'est un coup dur, mais je lutte, j'arrive à recoller l'arrière du peloton. Un jour. Un jour et je suis passée par tous les états d'âme en l'air, et malheureusement, ce n'est pas comme ça que ça marche bien pour moi. Je dois absolument être détendue en l'air, positive et concentrée. Je me jure alors pour le reste de la course de gérer mes émotions afin de rester lucide, sinon ça ne va pas bien se passer. L'équipe à l'air de bien tourner. Ils sont là quand je pose et quand je marche j'ai droit à des ravitaillements régulièrement et la bonne humeur est de mise.
1600m D+ / 35,5 km / 4 vols / 44,51 km 

Au cours de la journée suivante, la routine s'installe dans l'équipe, et ma routine, un pas après l'autre tel un métronome, fonctionne bien aussi. Un petit oubli de speedarm me mets un bon coup de stress et me rajoute 1 km de marche pour aller signer le turnpoint à Wagrain. Un petit 1000m de dénivelé en plus et me voilà en l'air direction Kitzbüehl. La masse d'air est bizarre, par moment très ventée, du foehn coule dans les vallées  latérales, mais malgré ça, ça vole plutôt bien et je pose derrière la station de Kitzbuehl. Encore un bout à pied pour signer le panneau au sommet de la fameuse Streif, puis décollage en direction de l'Allemagne. C'est déjà la fin de journée, le soleil ne réchauffe plus beaucoup et le vent du nord est bien présent. Michael vole devant moi et pose, quand je sens une légère ascendance. Du 0,3 mètre par seconde, autant dire que c'est quasi rien, mais je travaille dans cette bulle pour ne pas la perdre, je m'applique et finalement j'arrive à m'en sortir et à passer au dessus de magnifiques falaises pour finir par poser tout près de la frontière allemande. C'était une journée incroyable, mais quand même les conditions de vol étaient bien musclées. Je ne sais pas ce que ça représente sur mon échelle risque/sécurité.
2200m D+ / 38,56 km / 4 vols / 107,25 km

Jour 3, ou le fun absolu en marche et vol. 25km de bitume comme petit déjeuner, je savais que ça faisait partie du jeu, mais ces portions sont infernales. Ça n'en finit pas, il n'y a rien de beau à voir, les voitures passent toujours trop vite et trop proches. Je signe le turnpoint Achental, mes pieds brûlent, Joel s'en occupe un peu puis j'attaque ensuite une montée de 1000m avec Alex et Michael. Au déco, on sent du vent du Nord, mais par moment le thermique prend le dessus et donc il y a des bouffées de sud. On hésite puis finalement on décolle en Est pour aller chercher le thermique sous le vent en Sud. Ça marche, le début du vol est laborieux, ça ne monte pas très haut et c'est à nouveau très venté. C'est la lutte,  crête après crête j'ai l'impression de passer dans une machine à laver et je cherche désespérément la sortie. Je débouche finalement dans l'entrée de la vallée de l'Inn, soit en entonnoir où toute la masse d'air bavaroise s'engouffre. Le vent s'accélère, en en appui contre une face nord, je parviens à m'extraire pour traverser un plateau derrière. Ça se passe mieux que prévu et la vallée de Bayrischzell est plus accueillante, mais les thermiques faiblissent à cause de la couverture nuageuse qui s'épaissit. Toujours en mode survie, j'avance dans cette vallée, et plus j'avance, moins c'est accueillant pour poser. Des arbres, partout ! Non seulement c'est galère pour poser, mais en plus, il n'y a aucun décollage en vue. Si je pose c'est à pieds que je devrais sortir de cette infernale Bavière, et ça me motive à m'accrocher pour en sortir. À un certain moment, le ciel devient vraiment très menaçant et je décide de me préparer à poser pour des questions de sécurité. La seule option, le lit d'une rivière. Le vent est fort, c'est encaissé donc très turbulent. Mais d'un coup, je peux refaire quelques mètres en me cachant sous le vent d'une crête et passer derrière, dans l'espoir de trouver un meilleur atterrissage. Il y en a qu'un, une place d'évitement en bordure de route, entourée de sapins de 30m de haut. C'est chaud mais ça va le faire. Bien contente d'avoir les pieds au sol, je plie et me mets en route en laissant quelques affaires au team GER1. Les ennuis de cette journées continuent, on débriefe ensuite avec l'équipe pour la suite. Je suis dans un parc national à présent, il est interdit de dormir ici. Je dois donc en sortir à pieds, mais le timing est serré, je ne dois pas traîner. À 21h30, j'arrive au camping car exténuée, la nuit fera un grand bien !
1100m D+ / 63,73 km / 1 vol / 67,15 km

Pour le jour 4, nous décidons avec mes assistants de se rendre sur un déco au Nord Est de la Zugspitze, sommet que nous devons contourner par le nord avant de basculer sur Lermoos. Equipée de mon super routeur Joel, on s'enfonce dans une forêt dense dans le brouillard pour rejoindre ce décollage. La navigation est très compliquée, les chemins ne sont pas bien indiqués et on galère, les pieds mouillés dans l'herbe humide. Après une interminable aventure dans cette forêt, on arrive au décollage… Dans le brouillard. C'est un coup de massue. Que faire ? Attendre, redescendre un bout à pieds ? Je privilégie l'attente, et finalement le ciel s'ouvre un peu et je peux décoller pour basculer sur Garmisch-Partenkirchen. Au niveau de la couverture nuageuse, la vallée est bien plus ouverte que les reliefs et j'ose espérer pouvoir monter en thermique et m'enfiler vers Lermoos. L'espoir fait vivre, la réalité c'est que je me pose au pieds des installations de la Zugspitze. C'est reparti, à pieds pour un décollage caillouteux sous la cabine. Une petite demie heure avant d'y arriver, la météo redevient capricieuse et une fine pluie de bordure d'orage se met à tomber. Je n'ai pas une minute à perdre, il me faut m'échapper d'ici au plus vite. Au décollage, je rencontre Laurie (FRA4) qui peine à lever sa voile. Le vent vient de droite, les suspentes crochent partout et c'est pas gagné. Ma voile à peine ouverte, j'opte pour un gonflage cobra et j'arrive à décoller direct. Je file alors aussi vite que possible loin de la pluie, pour me poser sur le golf de Lermoos, à un kilomètre du signboard. Laurie me passe alors au dessus, en vol. Je suis un peu vexée de n'avoir pas osé enrouler la confluence au milieu de la vallée, mais j'avais trop peur de la voile mouillée, alors je cours sur ce kilomètre qui me sépare du turnpoint. Là bas, Laurie m'attend pour qu'on signe ensemble, un beau geste. Je profite alors un peu d'un bon ravitaillement en compagnie de Laurent, qui vole sur le parcours de la course et se déplace en transports publics, avec nuits à l'hôtel. C'est marrant, je ne les envie même pas tellement je suis à fond dans mon truc. Avec Laurie, on décide de monter sur un autre décollage. La météo ne fait que de changer. Soleil, orage, pluie, et toujours du vent, comme si il n'y avait pas assez de piment dans tout ça!Une légère pluie nous accompagne sur la montée, arrivés au décollage le ciel se fait plus clair et je décolle. Je pensais pouvoir m'appuyer au vent en rive gauche, mais en réalité, c'est de nouveau tout autre chose, et je ne peux que planer pour finalement poser dans la vallée. Une montée de 1000m qui aura peut être servi à rien, car la distance parcourue en vol est vraiment négligeable. Je plie et il se remet à pleuvoir, plus fort cette fois. Plus de vol pour aujourd'hui, je marche en direction de la vallée de Namlos, pour me placer idéalement le lendemain matin.
3050m D+ / 42,25 km / 3 vols / 21,25 km

Le réveil est dur au matin du jour 5. J'ai mal partout, mon genou est un peu faible (la rotule craque à chaque pas), mais la magie du lieu me permet de quand même apprécier le moment. Je comprends bien vite pourquoi je suis autant au bout de ma vie. Ça fait partie du jeu tous les mois et je dois faire avec, mais avec un ibuprofène chaque 6 heures, au moins pour la douleur. La montée au décollage est dure, dans des pierriers pentus, et mon pied montagnard me fait défaut. Michael s'inquiète de ma forme et je lui dit que ça va bien se passer, je dois juste aller tranquillement. La tête dans le guidon, nous arrivons sur le décollage choisi. Il fait beau, des nuages marquent une certaine instabilité et le timing est parfait pour l'exposition du décollage. Ni une ni deux, je décolle pour aller rejoindre le Lechtal. Et devinez quoi ? Ce n'est évidemment pas si bon que ça en à l'air. Le vent du nord soutenu me permettra de remonter en dynamique en étant bien bas. Quand j'arrive enfin à une altitude de croisière, je reconnais les caractéristique typiques d'une surpression au Nord dans les massifs alpins. Les vagues de vent descendant s'engouffrent dans les cols et m'appuie vers le bas. Sauve qui peut, je traverse la vallée pour aller m'appuyer dans cette masse d'air qui doit forcément remonter de l'autre coté. Ça marche cette fois et je peux parcourir quelques kilomètres en direction du col. Avant d'y arriver, en milieu de vallée, j'ai un gros doute. Je ne vois que de la forêt, et vu comme c'est turbulent, si je dois poser je risque de n'avoir aucunes options. Je décide alors de descendre et poser en sécurité. Steve (GB1) continue et m'appelle plus tard en me disant que j'avais bien fait, son atterrissage était un close-call. Mes assistants sont tous au col, en train de manger et j'ai la chance d'avoir un burger de course qu'Alex m'apportera après leur Kaiserschmarrn. Je suis à ce moment plutôt en forme compte tenu des conditions. J'arrive au col et on décide de monter sur les pistes pour décoller et espérer passer dans le Walsertal, comme Steve devant moi l'a fait. Cette montée me fait mal, j'ai des nausées, je suis à la limite de vomir. Je décolle et j'ai le droit à un misérable plouf, je n'arrive pas à passer le plateau en contrebas. C'est l'échec, j'essaie de redécoller pour tenter à nouveau de sortir de là, j'y arrive mais ça ne passe pas, un câble en dessous me barre la route et je dois poser, pour redescendre à pieds le dernier bout de ce maudit col, puis attaquer la montée de l'autre côté pour rejoindre une cabane et y dormir. La tension est palpable dans toute l'équipe. Papa essaie de positiver et de motiver Joel, mais il l'envoie valser. "Jean-Lou arrête maintenant !" Je crois voir sur la carte un chemin qui me ferait gagner du temps, j'en parle à Alex qui me laisse entendre que si il planifie des itinéraires, c'est pas pour que je fasse le contraire. Tous deux partent avec moi à l'assaut de la cabane, et les choses sont dites. Je suis trop négative aujourd'hui, et cela plombe le moral de l'équipe. Après avoir déballé notre sac, on continue la montée sous la pluie, pour finir en courant sous un orage violent. Trempés, on retrouve Michael qui avait de l'avance et qui profite d'un bon bout de gâteau. En réalité, la cabane est ouverte seulement pour des ouvriers volontaires qui travaillent sur les chemins et il n'y a donc pas grand chose à manger, les dortoirs sont libres mais ils n'y a pas de couvertures. Heureusement, je peux prendre une douche chaude, puis m'emballer dans toutes les couches que j'ai, en finissant par m'enrouler dans ma voile pour dormir.
2600m D+ / 50,96 km / 2 vols / 31 km

Le réveil du jour 6 est difficile, j'ai bien dormi, mais j'ai une tête de zombie. On se rapproche de la Suisse, le prochain turnpoint est le Säntis et je me réjouis d'y être. On décolle avec Michael à 6h de la cabane, pour un plané dans le Walsertal. Ça plane bien, et je pose dans la vallée où mon petit-déjeuner fétiche m'attend. Le ciel est bien bâché, mais ce mauvais stratus ne nous décourage pas. On tente l'option décollage à l'alpage, avec Joël et Michael. La montée est entrecoupé d'averse et de moment plus secs, on rigole bien et on espère toujours le créneau de vol. Arrivés à l'alpage, il pleut. On attend, le fromager aubergiste fait déguster à mes collègues son fromage, je bois un thé, nerveuse car la situation est vraiment compliquée et depuis ma mauvaise expérience dans le nuage il y a quelques années, je n'ose pas m'élancer lorsque je ne vois pas le sol. Une trouée arrive gentiment, on se dépêche pour décoller et je peux m'échapper dans la vallée sous la couche. La perte de temps due à l'attente me fait penser que ce n'était encore une fois pas la meilleure option, que marcher en bas dans la vallée aurait été plus rapide. Mais bon, je ne suis pas venue ici pour traverser les alpes uniquement à pieds avec mon parapente sur le dos. C'est le jeu, j'accepte et je continue à pieds en direction de Feldkirch. En visant le décollage utilisé par certains concurrents il y a 2 jours. Je reçois alors un appel du directeur de course qui me dit que j'ai volé dans le nuage, qu'un autre concurrent m'a dénoncé. Je suis folle de rage, j'ai attendu des plombes là haut pour ne pas le faire et quelqu'un dit que je l'ai fait. C'est sa parole contre la mienne, je laisse les mauvaises ondes au bord de la route, en espérant que la petite bruine reste aussi là et attaque la montée avec Alex, après un bon repas préparé par Joel et Papa.  Au décollage, on retrouve Laurie, et on décide de voler ensemble pour la traversée de la vallée du Rhin. C'est pas mal bâché mais malgré ça, des petits thermiques nous permettent de traverser sans trop de soucis et nous poser au pied du Säntis. C'est fou le bien que peut faire un si petit vol. Je suis remontée à bloc, contente d'être où je suis et en forme. Avec la team FRA4, l'ambiance est bonne et on monte tous ensemble au décollage dans le rayon autour du sommet. Sur la montée au décollage Michael s'affaire à optimiser le plan pour le lendemain. On est dans le jardin de Martin Scheel, le team leader de l'équipe suisse de parapente, et il nous aiguille plutôt sur un détour par les Grisons que par la traversée du canton de Glaris. "Ça peut marcher, mais ça ne sera pas facile" qu'il nous dit. Est ce qu'on est à cela près ? On décide de tenter le coup. Arrivés au décollage, c'est à nouveau les pires conditions imaginables qui nous accueillent. Du vent descend dans toute la combe, c'est raide et l'erreur n'a pas sa place. Décoller avec un tel vent arrière dans une telle pente est risqué. Je déplie et me prépare, dans l'espoir d'un créneau moins venté pour décoller. Il arrive gentiment et je m'envole direction les Churfisten. Je pose au dernier village, chambre d'hôtel et resto pour me requinquer d'une journée encore éprouvante.
2350m D+ / 45,39 km / 4 vols / 38,53 km

Au matin du 7ème jour, je me sens passablement fatiguée. Les jambes sont lourdes, mais le moral est bon. Joel m'accompagne pour la première ascension de la journée, le Chäserugg. A un tiers de la montée, nous sommes gratifiés par un magnifique lever de soleil au dessus de la brume stagnante dans la vallée, c'est un de ces moments hors du temps pendant lesquels on se laisse simplement éblouir par la lumière matinale, seuls en pleine nature. Je mets du temps à arriver à trouver un bon rythme. C'est lent, mais je ne peux pas plus. Joël est boosté par la perspective d'un vol qu'il a toujours rêvé de faire, car il a fait l'armée à Walenstadt. Le décollage est incroyable, sur les falaises qui dominent le Walensee. Un petit vent du sud me permet de gonfler la voile et sauter de la falaise. S'ensuit un plané malheureusement bien en deçà des espérances. Le vent du Sud est déjà marqué et ma finesse est catastrophique. A l'atterrissage, je suis un peu dépitée. On rajoute un bon 5 kilomètres à pied pour rejoindre le chemin qui nous mènera au décollage du Pizol. Je déjeune solidement pendant que Michael plie ma voile. Franchement je pense que si je savais la trotte qui m'attendait après, j'aurais déprimé. Mais un pas après l'autre, je rejoins Sargans et attaque la montée en compagnie d'un local et de Michael. Le plan était de s'arrêter à mi pente sur le décollage officiel et partir au sud ensuite, la réalité c'est que les voiles en l'air nous démontrait que c'était stable et que décoller là ne servait à rien. On rajoute donc un bon 500m de dénivelé pour monter sur la crête exposée en Sud. Les derniers mètres sont interminables, j'ai faim et ça n'en finit pas. J'arrive donc péniblement au décollage, à nouveau en compagnie de Laurie. Son team m'offre une banane, qu'est ce que ça fait du bien. On décolle ensemble et pour changer, les conditions ne sont pas telles qu'escomptées. Le vent du Sud est assez fort, je m'y prends à 3 fois pour passer la première crête et à chaque fois c'est machine à laver dans le rotor. J'abdique et essaye de passer plus bas, dès que l'arête me permettra de basculer. Ça passe finalement, un alpiniste est en train de monter sur la crête caillouteuse et je me surprends à lui parler dans ma tête. "Regarde moi bien mon gars, des fois que tu devrais appeler la Rega". C'est dire à quel point ce passage était horrible et engagé. Une fois de l'autre côté, c'est les montagnes russes encore dans le thermique haché sous le vent. À la prochaine crête, je suis enfin sur le bon versant, la masse d'air se calme et je peux profiter de l'endroit, que je connais relativement bien pour y avoir volé maintes fois en coupe du monde. Remonter jusqu'aux sources du Rhin est néanmoins un combat, le vent est toujours présent, sauf que maintenant que je vais à l'ouest, il vient de l'ouest… J'avance, appliquée, crête après crête pour arriver sur Disentis, bas mais contente du chemin parcouru. À ce moment là, je me dis que je vais poser car les thermiques ont disparu avec l'ombre que les cumulus projetaient. Mais mes assistants sont en feu et me disent de m'accrocher, que ça va marcher encore. Ils ont raison, ça marche. En appui avec l'Ouest je refais de l'altitude et me dirige en direction du col de l'Oberalp. Juste avant le col, il est 16 heures et il n'y a que des faces Est qui s'offrent à moi, bien évidemment sous le vent. Mais ça monte. Je n'en reviens toujours pas de ce moment où je bascule sur Andermatt ! À nouveau, un choix s'impose, rive gauche ou rive droite ? On me glisse à l'oreillette que Manu (GER1) est sur le versant exposé Nord et qu'il remonte. Malheureusement, l'info arrive un poil tard et je suis sur les faces Sud. Je pose donc à Hospental, profondément heureuse après un vol épique et ultra technique. "Ce soir les gars, on dort en Valais !". Un bon ravitaillement au bord de la route et c'est parti pour le dernier morceau de la journée, la Furka. J'y suis passée un certain nombre de fois en voiture avant, les lacets sont devant moi et mon souvenir est que ce n'est pas si long… Depuis quand on se fie à des trajets en voiture en marche et vol ??? Au sommet des lacets, le vague souvenir de la ligne droite qui mène au col est devant moi et plus du tout vague. Dieu que c'est long, mais je soir, on dort en Valais !!! Je suis requinquée par la force mentale que me donne cette perspective. Joel est avec moi en vélo électrique, l'ambiance est géniale et il n'en revient pas du chemin parcouru aujourd'hui ! L'arrivée au col me tire les larmes, tellement l'émotion est intense, partagée avec le Papa le plus fier du monde. Dans les souvenir émotionnels liés au sport, c'est de loin le plus puissant que je n'ai jamais eu. Ça passe avant les records du monde, avant mon titre de championne du monde. C'est indescriptible et pourtant, si on parle de la course, du classement, ce moment n'est rien ! Un bon souper, des rires, du partage et sous la couette pour une nuit bien fraîche.
4200m D+ / 46,93 km / 2 vols / 96,45 km

En ce matin du jour 8, je suis en forme, toujours un peu euphorique d'hier. On opte pour un décollage sur un petit sommet qui nous fera planer dans la vallée de Conches. Il fait beau, mais la traversée est un peu difficile, la neige n'a pas encore fondu, les pas sont prudents, car il n'est pas rare que je passe à travers la couche de neige et m'enfonce jusqu'à la taille. Avec Alex, Adi (photographe de la course) et Mélanie (sa compagne), nous arrivons sur le décollage, les conditions sont parfaites, et ce vol s'avère magique, tout doux. Malheureusement, je dois l'écourter de 2 kilomètres car j'arrive dans l'espace aérien de Münster. La journée de vol s'annonce bonne malgré un léger foehn, et je dois me dépêcher pour profiter de l'ensoleillement des faces Est. Mais avant de rejoindre le décollage de Fiesch, il me faut passer par Fiesch village  pour signer le turnpoint. J'opte pour un gros rythme, alternant course et marche, boostée par la perspective d'un beau vol dans mon jardin. L'arrivée au turnpoint est à nouveau riche en émotions, ma soeur est là avec ma petite nièce, je suis heureuse de les voir. Signature, ravitaillement et test covid et c'est parti pour la montée. Je croise l'assistant de Chrigel (SUI1) qui est déjà sur le chemin du retour vers Zell am See, Thomas Theurillat, qui est également mon coach mental. Il est complètement en stress, le gps de Chrigel n'a pas chargé pendant la nuit, et il doit lui amener un câble au décollage. Comme quoi les erreurs arrivent même aux plus expérimentés. La rencontre est brève mais l'accolade est chaleureuse: "tu as l'air contente, c'est magnifique ce que tu fais, continue comme ça, tu as le bon état d'esprit". Venant de lui qui connait mes défauts et qui a percé ma personnalité à jour, c'est un encouragement qui vaut de l'or. La montée est partagée avec Beat (un local qui a une forme phénoménale par rapport à son âge), il nous guide aussi sur le chemin le plus efficace et c'est une aide bienvenue. Arrivés au décollage, Joël est là avec mes affaires et quelques copains sont venus aussi, il y a une super ambiance. Michael Lacher (GER3) est également avec nous, on décolle ! Ça ne monte pas très bien, on repose deux fois à la pente pour temporiser au lieu de fuir en avant et risquer de passer sous la limite de la forêt et devoir poser en vallée. A la troisième tentative, on arrive enfin à monter et c'est parti pour la descente du Valais. Dans les thermiques, ça dérive en ouest, ce qui veut dire que le foehn est déjà présent. Malgré cela, les conditions sont plus qu'acceptables par rapport à ce que j'ai vécu dans cette course jusqu'à maintenant. Il n'y a pas trop de difficultés jusqu'à Crans-Montana, le ciel est très couvert et les thermiques faiblissent. L'ascendance est sur le pylône de l'installation de la Plaine-Morte, et l'exploiter correctement est difficile car on est 3 maintenant, Eduardo (MEX1) nous a rejoint. Passé ce passage difficile, on continue d'avancer vers les Diablerets. Maintenant il n'y a plus de soleil, le seul moyen de monter est de s'appuyer en dynamique sur les falaises du glacier 3000. Le vent est fort mais l'instant est magique. Ça monte des briques et c'est bien car on va bientôt devoir passer sur le canton de Vaud par le haut, pour nous éviter le détour par Martigny. Chaque mètre gagné en vol veut dire moins de marche, et on exploite l'ascendance jusqu'au sommet des falaises, pour se jeter ensuite sous le vent en direction de Villard. Ça se passe bien, et derrière la masse d'air est encore bien porteuse, grâce à une confluence. S'ensuit un plané en direction du Bouveret, je pose finalement à Vouvry. Plein de copains sont là, c'est génial, on définit le plan pour la suite. Soit monter en direction de Tanay, ce qui nous oblige de bivouaquer quelque part car il n'y a pas de route, soit partir à plat en direction du Bouveret puis monter sur Novel et y dormir dans le camping car. Pas trop motivée par la nuit en tente, on prend l'option 2. Au Bouveret, des collègues de Villeneuve sont là, on m'offre un cornet fraise et je suis escortée dans la bonne humeur. Sur le chemin forestier qui m'amène en direction de Novel, une Audi nous arrive dessus. C'est Reynald, notre routeur météo, et ses deux fils. Je suis heureuse de les voir, mais je me sens de moins en moins loquace, la fatigue se fait sentir gentiment. Joel me balance un "si j'avais su que c'était si long j'aurais pris le vélo électrique !". Ça me fait rire, car malgré les kilomètres que j'avale, je ne m'imagine pas les faire autrement qu'à pieds ! On arrive tôt au campement, ce qui me permet de profiter d'un bon souper en compagnie de David et Jérome, d'autres copains venus nous voir, et de faire une interview avec la RTS.
1700m D+ / 49,27 km / 2 vols / 104,34

La Dent d'Oche n'est pas loin, je dois la contourner par le Nord. Le lever de soleil est magnifique, c'est David et Michael qui m'accompagnent pour cette mise en jambes. On arrive au déco pour constater à quel point la journée va être difficile. Un voile d'altitude masque le soleil, il y a du vent du Sud et des orages sont annoncés en fin de journée. En gros il y a un petit créneau d'instabilité, et dès que le soleil aura assez chauffé, ça va gonfler et il va pleuvoir. On décolle en pensant réussir à s'appuyer au vent contre la Dent d'Oche mais c'est trop faible, et le vol va durer 3 minutes. Après avoir fait un petit cratère dans la combe en dessous, on reprend nos voiles en boule pour remonter 200m de dénivelé. Avec Eduardo et Michel, on redécolle, cap au Sud, direction Morzine. Petit vol de 10 kilomètres, rien à enrouler, on pose dans des pâturages à l'entrée de la vallée d'Abondance. On repart à pieds pour la Pointe de la Croix, j'espère vraiment qu'on va pouvoir un peu avancer en vol. Ça temporise un peu au décollage, on a vraisemblablement tous envie de sortir de ce Chablais par les airs. On décolle finalement, et directement après, on a droit à une grosse transition. En face, ça tient, une légère brise nous permet de nous appuyer contre les reliefs et on arrive à avancer, lentement, mais en volant, c'est l'essentiel. J'arrive à poser sur l'atterrissage officiel de Morzine. Alex me plie la voile et je me relaxe un peu avant de repartir à pieds en direction du Col de Joux Plane. L'instabilité arrive alors que je monte avec Michel, on décide de pousser le rythme pour ne pas rater le créneau. Arrivés au col, c'est la course. Le ciel est déjà noir sur Samoëns, la pluie menace. Incroyable comme les conditions changent vite. Après avoir trempé mes élévateurs et suspentes dans de la beuse fraîche, je m'envole en direction du Mont-Blanc. Ça monte, mais j'ai peur, ça pue la pluie, le vent est fort. Je m'échappe pour poser en face au plus vite. Je plie en vitesse et il commence à pleuvoir un peu mais le nuage qui déverse s'est décalé et j'aurais pu tenter quelque chose. Tant pis, maintenant il faut marcher, trouver un décollage car la prévision nous laisse oser un vol pour se rapprocher de la vallée de Contamines. On débouche sur la crête au dessus des Carroz, sur la carte, une clairière avait l'air d'offrir un bon décollage, mais en réalité… On continue à marcher, pour arriver au sommet des pistes. Là, c'est l'apocalypse. Un énorme orage nous arrive dessus et il faut absolument trouver un abri. La foudre tombe sur un pylône du télésiège juste à côté de nous. Ça fait peur mais mes ingénieurs d'assistants me répètent que sur notre petit bout de terrasse, on risque rien. À ce moment précis, Chrigel arrive au bout de la course à Zell am See. Je lui envoie une photo des trombes d'eau en le félicitant. Cette fois je réalise bien à quel point cette course est difficile et à quel point c'est un athlète hors-normes. Le ciel s'éclaircit peu à peu et notre créneau de vol se dessine. On opte pour un décollage sous une ligne à haute-tension, ça fait vraiment bizarre. Le vol est calme et je suis contente d'être en l'air, de ne pas devoir descendre de cette montagne à pieds. J'attérris à l'extrémité Est de Sallanches et décide de m'arrêter là pour ce soir. Michel et Eduardo continueront à marcher pour couvrir 10 kilomètres de plus.
3200m D+ / 32 km / 5 vols/ 40,2 km

Le réveil à 5h sonne encore une fois, la fatigue se fait ressentir mais le moral est toujours bon, et j'ai appris ces derniers jours que la tête peut me faire avancer même quand les jambes n'en peuvent plus. Je pars à pieds et suis rejointe par Yves, qui m'a grandement aidé à financer cette course. J'avais aussi peur, avant de partir, de ne pas être à la hauteur vis-à-vis de toutes les personnes qui m'ont aidée financièrement. Maintenant, même si je sais que je n'arriverais pas au but, à Zell am See, j'estime ma prestation plus qu'honorable. On en discute et il est d'accord, ce que je réalise est incroyable. À présent, un sacré morceau se dresse sur ma route. Le tour du Mont-Blanc, à pieds par le Col du Bonhomme et le Col de la Seigne, car la météo est exécrable et ne donne aucun espoir de vol. J'ai un peu mal géré la partie de Saint-Gervais jusqu'au fond de vallée. Je n'ai pas assez mangé et au moment du ravitaillement, je mange tout ce que je peux mais sens que je devrais manger plus, sans y parvenir. On se met en route avec Alex et Michael, et après une petite heure de marche, je sens l'hypoglycémie arriver. C'est critique, et le seul moyen de l'enrayer c'est de manger. Chaque 15 minutes, je prends quelque chose. Ça finit par passer, ouf. La montée au col du Bonhomme est rythmée par des orages, avec des averses de grêle en prime. Quand on débouche finalement en haut, c'est la surprise, le ciel est clair dans le Beaufortain. J'ai l'impression de ne pas avancer, mais on dépasse malgré tout des randonneurs qui font le tour du Mont-Blanc. Ce n'est peut être pas si pire en définitive… L'éclaircie se maintient et me permet de décoller et éviter la descente à pieds et me poser au pied du col de la Seigne. Un vol de gagné sur une journée où ça ne devait pas voler, c'est très appréciable. Je vois Eduardo qui se met en l'air et arrive à basculer sur Courmayeur. J'ose espérer pareil dénouement, mais lors qu'on arrive au col, c'est très venté et le relief derrière très plat. Cela voudrait dire décoller au vent, passer le col et espérer que ça plane assez bien pour ne pas s'écraser. Le jeu n'en vaut pas la chandelle, et j'ai la (très très fausse) impression que Courmayeur est juste là en bas, derrière le premier replat. On opte donc pour une descente à pieds en en ski sur les névés, en m'amusant comme une gamine. La distance qui me sépare de Courmayeur est en réalité de 15 kilomètres, j'en ai déjà avalé 44 depuis ce matin… C'est vraiment très long, après chaque replat il y en a un autre, le tout sous la pluie, le grésil et parfois le soleil. On arrive quand même à partir en fou rire lorsque Michael décide de me faire une interview à l'américaine. Je finis la descente sur Entrèves avec Joël qui s'amuse en vélo, en me réjouissant de manger car le dernier repas remonte à bien longtemps. Au restaurant, je n'ai plus de force, je mange ma pizza mais n'ai plus la patience d'attendre le dessert. Je file me mettre au lit, mais je ne dormirais pas. Joël doit rentrer pour s'occuper de sa famille (c'était prévu), Alex se sent inutile et veut rentrer car quoi qu'il arrive maintenant, le résultat ne changera pas. Donc je dois organiser mes affaires pour les mettre dans le California car seul Michael et Papa continueront avec moi demain. Ce stress m'empêche de trouver le sommeil, et pour le première fois dans cette épopée, mon mental flanche.
2850m D+ / 59,82 km / 1 vol / 6,82 km

Bien que tardif, le réveil de ce 11ème jour est dur. Le plan n'a pas changé, on sépare les affaires et avec Michael on part en direction du Pavillon, un décollage en plein au milieu des faces Sud du Mont-Blanc. Je craque encore, les larmes viennent sans que je puisse y faire quoi que ce soit, je doute. J'ai peur avec cette fatigue de me mettre en danger, de ne pas prendre les bonnes décisions en vol. Michael est là pour me soutenir, il ébauche un plan. Quand on arrive au décollage, je dois dormir, et ce soir, on sera à Verbier. Cette perspective est réjouissante mais trop lointaine pour le moment. Joel nous a rejoint en vélo et avec Michael, ils me préparent un lit, dans la voile. Je dors un peu, ce qui me fait me sentir un peu mieux, puis on se rend sur le décollage. Le vent est bon, et dès la sortie, une agréable ascendance me permet de bien monter. Ce thermique, je me rendrais compte un peu plus tard, est en fait une confluence du vent du Nord qui coule derrière le col Ferret et de la brise de vallée qui s'engouffre par Courmayeur. Je pars ensuite en transition, collée dans les faces, sous la neige parfois et maintenant c'est clair, cette première ascendance sera la seule. Le vol est court, je pose en compagnie de Michael dans le Val Ferret italien. Il nous faut donc remonter à pieds vers le Grand Col Ferret, d'où on espère décoller. La montée est encore dure, vu que mon mental me fait défaut, les jambes ne veulent plus avancer. On s'arrête encore pour une sieste, mais je n'arriverais pas à dormir malheureusement. Arrivés au col, je vois enfin la maison. L'objectif est clair et toute l'énergie que j'avais perdu me revient d'un coup. Des vautours fauves nous indiquent un thermique juste devant nous, c'est parti. Le vol est compliqué, le vent du Nord rentre fort en vallée et je dois avancer contre celui-ci. Les vautours m'accompagnent dans les thermiques sous le vent de la rive droite, c'est un spectacle magnifique. Arrivée au dessus de Saleinaz, il se met à pleuvoir et je pense à me poser en altitude pour attendre que ça passe. Malheureusement, la zone en dessous de moi est dans un district franc, et je n'ai pas le droit d'y atterrir ou d'y décoller. Je suis contrainte de continuer sous une légère pluie. Pour basculer au dessus d'Orsières c'est chaud, je suis vraiment appuyée et je dois slalomer entre les arbres pour passer. Je transite ensuite vers le faces Ouest du Six-Blanc, mais ma ligne est catastrophique et je perds beaucoup d'altitude. Au lieu de poser en fond de vallée, je me pose à La Rosière, et suis rejointe par JP puis Papa, Tim et une ribambelle de copains. J'ai droit à un bon ravitaillement avec des spécialités valdôtaines et fraises du Valais et, guidés par Jean-René,  on se remet en route pour décoller au Larzay, en espérant s'appuyer en soaring pour monter et de basculer enfin sur Bagnes. Mes problèmes du matin ont totalement disparu, j'ai l'impression d'être dans une autre journée maintenant. Au décollage, plein de copains sont là, ils m'aident à préparer la voile et décoller. En l'air, le vent a faibli et ce n'est pas possible de monter, j'opte donc pour un atterrissage au Cotterg. Papa est là, mais aussi la famille Brinkreve, qui m'ont beaucoup soutenu dans cette aventure. Je profite du moment avant d'attaquer le Reposoir, itinéraire que j'ai effectué un nombre incalculable de fois dans mes entrainements. Benjamin et Valentine se joignent à nous, ça fait plaisir de voir des jeunes motivés à partager une marche comme ça. Michael est bluffé par le rythme que j'arrive à mettre maintenant, alors que j'étais au bout de ma vie ce matin. A Verbier village, c'est des cloches de vache qui m'accueillent, gaiement secouées par Ruoss et Dédé, propriétaire de Medran sport, qui nous a prêté un vélo électrique pour la course. Je suis accueillie chez moi par Maman, c'est bon de la revoir et sentir sa fierté. Ils me cuisinent un bon plat de pâtes et j'ai droit à des muffins choco banane que Kasia (ma colloc) a fait. Je me glisse dans mon lit douillet pour une bonne nuit de sommeil.
2700m D+ / 19,89 km / 3 vols / 33,51 km

Aujourd'hui, c'est l'avant dernier jour de course et il est vrai, quoique je fasse, je ne risque pas l'élimination, donc je me contente de profiter du moment, et finir ce challenge que, je dois l'avouer, trouve trop long. Il nous faut avancer quand même, je ne vais pas rester à la maison en attendant que ça passe. Je pars seule en direction de la Croix-de-Coeur. Michael a dormi chez mes parents, et je le rejoins au Namasté. Pause sandwich viande séchée et café, puis je finis la montée vers le col. Là haut m'attendent Lydia et d'autres copains, et la pluie… Ce n'est pas vraiment les conditions que l'on attendait. Le ciel est gris et les averses, légères certes, se succèdent. Quand ça se calme, on monte un peu plus haut pour décoller et se jeter dans le col sous le vent, en direction de Nendaz. Je parviens à monter un peu sur l'arête du Fou, pour finalement poser au pied des remontées de Tracouet. Encore une montée pour se rendre sur un décollage, dans la magnifique forêt de mélèzes de Balavaud. Arrivés à Tracouet, Michael décolle et parvient à sortir. Son décollage étant un peu limite, je décide de me rendre sur le décollage officiel est peu plus loin. Mais le vent est fort, la pluie est juste à coté, et je doute. Je décolle, gagne quelques mètres mais me repose aussitôt car il pleut à nouveau. Ça serait trop bête de dépasser la limite maintenant, mais je bouillonne en attendant. Ça m'énerve de ne pas oser engager, en sachant que ça l'a fait pour Michael. Mais la frontière entre raison et bêtise est fine, je me dois d'écouter mes ressentis. Encore de l'attente, puis je me remets en l'air, parviens gentiment au sommet de la Dent de Nendaz en dynamique et bascule sur Veysonnaz. Le ciel est plus clément maintenant, il y a même du soleil. Sur la piste de l'ours, je sors les pieds pour atterrir quand je sens une petite bulle. Concentrée, j'arrive tout doucement à l'exploiter pour sortir au dessus de Thyon 2000, et me jeter dans la transition sur Nax. J'atteins le flanc de la montagne au milieu de la forêt, mais ne parviens pas à gagner assez d'altitude pour contourner la zone de l'aéroport de Sion. Il faut prendre une décision et vite, si je descends plus, il n'y aura plus de clairière pour poser et cela rallongerait la montée vers le Mont Noble. Je pose donc à la pente dans une clairière, plie et me remets en route pour un décollage sur les pistes de Nax. Au déco, je retrouve Michael qui est prêt, et on s'envole ensemble pour avancer, dans la plaine du Rhône cette fois. J'atterris en bordure du bois de Finges, des copains viennent me trouver, on rigole et on se donne rendez-vous au Relais Bayard pour une belle pièce de boeuf sur ardoise, en compagnie de ma soeur et ses enfants et la famille de Joël. Après avoir mangé, la fatigue m'assaille et je m'endors à table. Il reste quelques heures pour avancer, donc je me motive et prends la direction de Niedergesteln où je serais accueillie pour la nuit chez un copain de Michael, Thomas.
1900m D+ / 32,87 km / 3 vols / 42,13

C'est le dernier jour, je suis soulagée, je n'osais même plus les compter tellement c'était long. Je marche 2h pour arriver à Viège, où j'arrêterai la course. La fin de course officielle est à 11h, mais si je m'arrête à ce moment là, je n'aurais pas le temps de faire la route pour me rendre à Zell am See. Le directeur de course trouve bien que je sois présente, car j'ai réalisé la plus grosse performance féminine sur cette course de dingue. Chose que je n'ai pas faite en 12 jours, je me pose dans la voiture et on commence à rouler avec Papa. Les kilomètres n'ont pas la même saveur ! Je propose à un moment de prendre le volant, mais c'est incroyable, toute l'adrénaline à disparu et je suis incapable de conduire plus d'une demie-heure sans m'endormir. Mon chauffeur me conduis à bon port, et avant la cérémonie, j'effectue quelques interviews et rends le matériel prêté par l'organisation. La remise des prix est une belle fête, beaucoup d'athlètes sont là et le partage est vraiment sympa. Je vois sur les visages marqués de tous à quel point ça a été dur pour tout le monde. Les yeux sont petits, les nez brûlés par le soleil. Les félicitations tombent et je me rends de plus en plus compte la qualité de ma performance.
0m D+ / 10,21 km

Total: 29’450m D+ / 527,41 km / 34 vols / 633,14 km

Bien vite après la fin de course, je reçois des quantités de message de félicitations. Particulièrement de femmes, qui me disent que j'ai été une inspiration. Cela me touche profondément, mais au fond de moi, je sais que je ma carrière n'a jamais été motivée par la perspective de la gloire ou d'être un modèle. J'ai fait ce dont j'avais envie, progressé et travaillé pour réaliser mes rêves, et c'est le seul conseil que je peux donner aux personnes ambitieuses dans mon genre. Mon ego ne gonfle pas, je resterais toujours humble, tout en étant fière de ce qu'on a accompli avec toute l'équipe, dans l'aspect performance, mais aussi la manière dont on l'a fait. Je ne pourrais jamais remercier assez Alex, Joël et Michael pour tout ce qu'ils ont fait. Et partager cette aventure avec Papa, ça n'a pas de prix.

Certains pilotes ont parlé d'une sorte d'état de dépression après la course. Le retour à la réalité, la vie normale, peut sembler bien fade après 2 semaines de telle intensité. De retour à la maison après cette épopée, je ne vis pas du tout cela, heureusement, même si accepter la fatigue du corps et de l'esprit n'est pas facile. Je me lève le matin, à 5h, me rendors et rêve. Des rêves qui me démontre que le stress de la course est toujours là. L'équipe qui plante le camping car ou encore que je rate le départ de la course car je ne me suis pas réveillée. Je me lève ensuite et ne pense qu'à manger, refaire des stocks d'énergie. Les matinées sont faciles à gérer, je m'affaire un peu, mais les après-midi sont compliqués. Pendant 1 semaine et demi, un coup de barre monumental m'assomme en début d'après-midi, je dois dormir 2 ou 3 heures. Je me laisse aller à ce rythme de flaque. Consciente que ça va passer, et la météo de ce début juillet ne laisse pas trop de place à l'envie de faire autre chose. Après 2 semaines de gros repos, j'attaque la saison de biplace à Villeneuve. Le moral est toujours au beau fixe, il est temps de renflouer la caisse et se préparer pour le prochain objectif, la finale de coupe du monde à Disentis.

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Je suis ambitieuse, et ce titre manque à mon palmarès. La météo est relativement bonne, ça vole bien, malgré du vent, encore et toujours… Je suis mentalement étonnamment très calme. Je veux ce titre mais ne ressens aucune pression. J'ai l'impression d'avoir tout mis dans ma X-alps. En l'air, je suis calme, bien alerte et accepte sans soucis les conditions parfois turbulentes. Malheureusement, l'entame de la compétition n'est pas bonne. Je suis encore en mode X-alps, et n'optimise pas les régimes de vol et les montées en thermique. Je me ressaisis gentiment, mais le mal est fait et le niveau très élevé, je ne pourrais pas jouer la gagne. Le podium oui, mais ce que j'identifie sur le moment comme un manque de réussite me donne au final une quatrième place. Je suis déçue certes, mais quand je rentre par la Furka après la compétition, je me rappelle du chemin accompli cette année et ne peux que laisser ce sentiment d'accomplissement engloutir le reste. Il y en aura d'autres, des finales de coupe du monde !

Retour par la case biplace. L'entrainement physique a pour ainsi dire disparu maintenant. Le manque d'objectifs y est certainement pour quelque chose, mais je n'ai aussi plus envie de me faire du mal à l'entrainement. Les sorties sont donc uniquement du plaisir. En vélo ou à pied, j'apprécie de me dépenser sans me focaliser sur ma fréquence cardiaque et le chronomètre.

Le prochain objectif de cette année se déroule au Brésil, avec la chasse aux records. Reynald s'étant blessé, je me rends dans le Nordeste avec une équipe de suisse-allemands bien motivés. Dominic et Michael (Sigel) sont les pilotes les plus forts et qui ont le plus d'expérience là-bas. Sur les premiers vols, je suis treuillée avec d'autres pilotes, mais n'arrive pas à voler avec eux, et me retrouve souvent seule dans l'immensité du Sertao. Ce n'est pas évident, seule je ressens une certaine tension, une petite peur de devoir poser quelque part sans que personne ne sache où je suis, malgré ma balise satellite. Mes choix en l'air sont grandement influencés par cela, et je vise des routes, ce qui diminue mon efficacité. Le vent, dont j'ai maintenant besoin, n'est pas assez fort pour espérer battre mon record du monde. Vers la moitié du séjour, il augmente et une fenêtre à plus de 500 kilomètres potentiels se dessine. Le 15 octobre, je décolle après Michi et Domi, les recolle au 3ème thermique et ensemble, nous faisons un groupe de vol efficace. Au début du vol, Domi est un peu à la traîne, il s'énerve de nous faire temporiser pour l'attendre. Nous convenons de rester ensemble, conscient de l'efficacité que cela amène de voler en groupe. Ensuite, c'est Michi qui devra s'extraire de tout en bas après une mauvaise transition, puis mon tour de peiner vers les 2/3 du vol. Les 600 kilomètres ne sont pas possibles, il est trop tard, et ils temporisent donc à leur tour pour m'attendre. Lors de la transition avant le plateau final, on est rejoints par Tilen, qui pousse fort pour son dernier vol ici. La confluence est là au dessus de Nova Russas, et cette portion est avalée facilement. Les fin de vol au Brésil sont toujours incroyables, avec la lumière du soleil qui décline sur ces espaces vastes et infinis. Nous passons les 500 kilomètres au compteur, et le record et ligne direct est toujours envisageable (531 kilomètres, vol que j'avais réalisé en 2019). Toutes les petites ascendances sont exploitées, en se laissant dériver vers l'Ouest. Au final, je pose après 523 kilomètre en ligne droite, il en aura manqué un peu, mais le sentiment d'accomplissement est bien présent, car je passe une deuxième fois la barrière mythique des 500, et je suis toujours la seule femme à l'avoir fait.
Zoio, un membre de l'équipe logistique arrive et nous partons à la recherche des autres pilotes suisses qui ont posé plus court. On dort tous à Nova Russas après du fromage à la pizza, et rentrons le lendemain sur Caico.
Le manque de vent me fait abréger la partie vol de ce voyage et je me rends à Paracuru pour quelques jours de kitesurf et farniente, avant de rentrer en Suisse.
Malgré le peu de gros vol et qu'il n'y ait pas de records à la clé, je sens et vois que mon niveau est là. Mes choix sont justes, je suis efficace et sereine, concentrée et motivée, le mental est bon. De bonne augure pour le prochain et dernier objectif 2021, les championnats du monde.

Le choix de rentrer à la maison pour une semaine avant de repartir en Argentine est motivé par les contraintes de voyage avec 2 gros bagages et le covid, même si c'est un peu aberrant. De retour à Verbier, je profite de quelques jours pour refaire un peu de sport. J'ai lu dernièrement que la maison n'est pas un endroit, que c'est un sentiment. Le sentiment d'être à la bonne place, de faire ce qui nous importe et qui nous comble en tant qu'humain. Chaque fois que je reviens ici, c'est exactement ce que je ressens. Je suis donc contente d'avoir choisi de rentrer, et prête à en découdre lorsque je m'envole pour Buenos Aires avec l'équipe suisse.

Initialement prévus en France, mais annulés puis déplacés à cause de la situation sanitaire début mai, ces championnats ont lieu sur un site peu connu et qui n'a pas fait ses preuves. On connaît juste quelques caractéristiques du site, à savoir les thermiques faibles et le vent parfois bien présent, ce qui promet de rendre la tâche difficile. Parvenus sur le site de vol après un long voyage, on rejoint Jörg, notre teamleader et on s'installe dans notre maison. Je dois avouer que la cohabitation à 11 dans une maison pendant 2 semaines m'a passablement inquiétée. De nature solitaire et ayant besoin de beaucoup de calme, je craignais ne pas avoir assez de moments tranquilles, et aussi de prendre l'énergie négative d'autres pilotes en cas de contre-performance. Tout ça n'a l'air de rien, mais j'ai appris à quel point il est important pour moi que mon mental soit au top, et toutes les petites choses qui peuvent l'entraver sont significatives. Heureusement, après quelques jours, la vie en groupe prend son cours et tout se passe bien. J'ai aussi décidé de changer légèrement d'état d'esprit par rapport à Disentis. Ce n'est pas la faute à pas de chance si mes résultats ne sont pas tels qu'espérés, et c'est fini de me dire que je manque de réussite. Comme dit Maman: "You can". J'aborde donc cette compétition détendue, en sachant exactement ce que je dois faire et les erreurs à ne pas commettre. Quand j'ai commencé la compétition, Martin (Scheel, chef de la ligue suisse) m'avait dit qu'un jour je serais championne du monde, voyant dès mes débuts mon potentiel. J'ai toujours osé y croire, mais sans forcément savoir comment y arriver. Après quelques jours de compétition, je suis en tête du classement et il est temps de l'appeler pour un débriefing. La conclusion de cet échange est que je suis capable, qu'il me faut juste continuer à voler sans pression, en étant concentrée et réfléchie.
La compétition est malheureusement rythmée par un nombre incalculable de protets, dûs à des décisions de l'organisation et des effractions d'espaces aériens. Je me dois de garder ma force mentale, rester dans mon mode de performance, de laisser de côté tout ce qu'il se passe et de continuer à voler bien et juste. Ce n'est pas facile, car tout est susceptible de changer le classement. Il reste maintenant 2 manches potentielles, et je suis toujours en tête du classement, en passe de réaliser un autre rêve. Mais ce n'est pas fini, et dans ce sport, c'est fini que lorsque les deux pieds touchent le sol, au dernier jour de la compétition. La pression monte de mon côté, forcément. Sachant plus que jamais ce que je dois faire j'attaque ces deux dernières manches ultra motivée, prête à en découdre, en gardant constamment un oeil sur mes adversaires, ce qu'en temps normal j'évite de faire car c'est contre productif. J'arrive à contrôler, rester haute et ne pas me mettre en danger, je fais le job, en prenant un peu plus de marge sur le dernier plané final vers La Conceptiòn. La ligne est passée, et je le sais, je suis championne du monde. C'est un soulagement, mêlé à une certaine fierté que je garde pour moi. Quel chemin accompli, des hauts, des bas, mais avec un mental incroyablement fort je finis cette année en soulevant le Graal du parapentiste compétiteur. Une belle fête est organisée, je me laisse enfin aller. La première chose que ça fait d'être championne du monde, c'est mal aux cheveux !

De retour à la maison, c'est une question qui reviendra souvent: "Qu'est ce que ça fait d'être championne du monde ?" A vrai dire, je ne sais pas… j'ai l'impression que l'émulation est plus forte dans mon entourage que dans ma tête. Je ne sais pas si c'est par gêne ou par humilité que je n'arrive pas à répondre à cette question. Ça a toujours été un but qui était réalisable, être motivée par ce titre a fait partie de ma vie et maintenant que je l'ai, ça semble une suite logique. Concernant la suite, il y aura toujours des challenges à relever, il y a 17 pilotes devant moi et pleins d'autres qui n'étaient pas présents qui sont meilleurs que moi. J'ai encore à apprendre, des pistes travailler pour devenir meilleure. Mais maintenant, je me rends compte à quel point le mental est important dans ce sport, ainsi que la tactique car le bagage technique des meilleurs est vraiment similaire !

Choisir de faire de ma passion ma vie n'a jamais été chose facile. Ce n'est pas un sport dans lequel on gagne beaucoup, car les retombées médiatiques sont faibles. Il est clair que j'ai "la belle vie" comme diraient certains, mais il fallait oser. Oser rêver d'en vivre, et oser prendre ce risque, sans aucune certitude que ça marcherait. Se faire une place dans le monde des "grands" n'est pas évident. J'ai énormément appris par moi-même, ce qui m'a conduit à beaucoup d'erreurs qui impactaient surtout un résultat, d'autres plus graves qui ont mis en danger mon intégrité physique ou carrément ma vie. J'ai toujours eu une certaine chance dans mes malheurs, et du batailler pour me remettre sur le droit chemin après ces close-calls. Ça fait partie de ce sport qui n'est pas anodin. Je souhaite maintenant continuer cette progression, tout en appréciant toujours de voler, aussi des fois sans objectifs, juste pour la beauté de planer dans le ciel au coeur des montagnes que j'aime tant et pour le bien-être que cela m'apporte. Le jour où je n'éprouverais plus de plaisir à faire la course, j'espère retomber sur mes pattes et trouver un métier qui me procure autant de satisfaction. Autrement dit, ce n'est pas demain !

J'espère que vous avez apprécié cette lecture. A bientôt, Yael

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Hello à tous!

Il était bien temps de vous donner des nouvelles sur ma préparation !

Donc voilà, à moins de deux jours de la course, posée au camping de Wagrain, je vais prendre quelques minutes pour résumer les dernier mois qui se sont écoulés... Malheureusement ce ne sera pas en images, ma connexion internet est trop mauvaise. 

Je m'étais arrêtée au mois de mars, après l'annonce de la route. Ca me semble être il y a une éternité tellement le temps a passé vite, je dois faire défiler ma galerie photo pour me rappeler ce que j'ai fait !

Avril, c'était le mois de transition entre les skis et les baskets. J'avais gentiment mangé assez de dénivelé en bord de piste pour passer en mode marche !

La dernière belle sortie à ski, c'était le Rogneux, agrémentée d'une descente en biplace, avec Yves, manager à ses heures perdues, à qui je dois beaucoup. Grâce à lui le budget a été bouclé.

Je fais ensuite une petite escapade par le Tessin pour aller voler un peu et reconnaître une portion du parcours qui s'annonce bien technique.

Le 18 avril, le coach m'a mis au programme un kilomètre vertical. Joël vient avec moi pour me montrer qu'il a une caisse d'enfer. J'avale les 1000m de dénivelé en 55 min au rupteur. Et ouais, le bon diesel que je suis n'aime pas trop ce genre d'effort ! 

Le 20 avril, je profite d'une belle journée pour me dégourdir les plumes! Au départ de Verbier, je réalise un superbe vol de 208 km en allant tourner à Ugine puis aux Pléiades et rentrer à Verbier.

Le 25 avril je remets des kilomètres au compteur avec un superbe triangle de 222km depuis le Niesen.

En mai,  je suis décidée à faire du volume pour gagner en confiance en vol. La météo ne me laissera pas beaucoup d'options. Du coup je marche et cours dans la neige et la boue. Pas le plus cool, mais je dois avouer que descendre les pistes de ski en baskets c'est un petit jeu que j'aime bien ! 

Je ressors aussi le vélo de route et le vtt pour varier les sorties.

Le 15 mai, on fait une journée test (similaire à une journée xalps) avec Alex pour voir un peu comment on s'organise sur une journée de course. C'est très intéressant et on apprend beaucoup.

Les sollicitations médiatiques augmentent sérieusement à partir du 20 mai. Je joue le jeu, mais croyez moi, je n'aime pas ça. J'essaie toujours de rester moi même et de me détacher de tout ça pour ne pas me mettre de pression. Facile à dire, on verra si ça marche! Je ressens également les attentes que tout le monde a par rapport à ma participation à cette course. Advienne que pourra, j'aurais fait de mon mieux niveau prépa pour être au top!

En juin, la charge d'entraînement diminue drastiquement. Heureusement car je ne sais pas où donner de la tête. C'est difficile de s'imaginer tout ce dont on a besoin au niveau matériel, électronique, nourriture, etc...

Mes checklists se remplissent petit à petit, le jour du départ approche et il me manque l'élément principal, la maison Sui4. On va avec Alex chercher le camper à Thun le vendredi 11 pour un départ le 14, le temps de tout charger et essayer d'organiser de tout de façon logique.

Ma semaine de préparation à Wagrain avec Alex me démontrera que la logique c'est subjectif. Je le laisse donc gérer ça un peu comme il le pense car c'est lui et Joël qui vont devoir savoir où se trouvent les choses. Cette semaine est la dernière avant la course, on passe par une série de checks, matériel, médical, branding (ils veulent voir si on a bien apposé les logos au bon endroit).

Aujourd'hui, dernier jour. Je suis sollicitée au dernier moment pour la conférence de presse officielle à Salzburg, dans le mythique hangar 7. Je reviens au camping ensuite pour finaliser avec toute l'équipe les détails. 

C'est parti pour la grande aventure !

Merci d'avoir suivi ma préparation, MERCI à mes sponsors et à vous tous de me soutenir par vos messages, d'avoir contribué de quelconque manière pour me permettre de vivre ce rêve !

Je vous invite à suivre le live tracking sur https://www.redbullxalps.com/live-tracking.html

A plus !

Salut à tous !

Je profite de cette première semaine de vrai repos pour revenir sur les 4 derniers mois.

Depuis le 13 octobre, date à laquelle la sélection des athlètes de la Red Bull X-Alps a été annoncée, mon objectif de participer à cette course mythique est devenue une réalité, et ma préparation une obsession !

Depuis novembre, suivie par un nouveau coach (Michael Randin, ancien cycliste pro), la charge de travail en endurance n'a fait que d'augmenter, mettant mon corps et mon mental parfois à rude épreuve. 

Concilier travail et entrainement n'est pas toujours évident, et je l'avais passablement ressenti sur les derniers hivers avec une nette baisse de forme en fin de saison dûe au manque de repos, Grâce à tous les dons et les sponsors trouvés, j'ai pu mettre de côté mon travail de prof de ski cet hiver pour me consacrer à fond dans cette préparation.

 

Novembre:

Premier mois avec Michael comme coach. Il a fallu 2 semaines pour adapter l'entraînement à ma forme physique, trouver les bonnes intensités. L'essentiel de l'entrainement de ce mois s'est fait à pieds, parfois avec le sac que j'aurais pendant la course (7kg), parfois avec une voile légère juste pour redescendre. La météo était magnifique et c'est beaucoup plus facile de s'entrainer avec le soleil. J'ai souvent répété les mêmes itinéraires car il y a des lieux où l'on se sent bien, chez soi, et j'aime y retourner, je ne me lasse jamais des ces montagnes et ces points de vue uniques. Le mois s'est terminé avec 30'000m de dénivelé positif dans les jambes pour 25 sorties. 

J'ai aussi été voir une nutritionniste, car j'avais tendance à ne pas bien récupérer, avoir souvent les jambes lourdes. L'objectif n'était pas de faire un régime mais de trouver ce qui me manquait. J'ai donc recommencé à manger de la viande, ainsi qu'à ajouter pas mal de lipides dans mon alimentation, le tout avec beaucoup de verdure. Depuis je me sens vraiment mieux au niveau de l'énergie. 

Décembre:

La neige arrive, l'envie de ressortir les skis aussi ! Les premières sorties en ski alpinisme ont vraiment été dures. Il parait que c'est normal lors d'un changement de sport. Personnellement, la première semaine m'a déprimé ! Ensuite tout est rentré dans l'ordre et j'ai enchainé la même montée encore et encore. Là c'est sûr que ça a été un peu rébarbatif et ennuyeux, mais les conditions de neige ne permettaient pas grand chose d'autre, par contre je pouvais descendre en vol.
C'est en décembre que je signe un partenariat pour la X-alps avec Decalia (https://www.decaliagroup.com/fr/). Créée en 2014 à Genève, DECALIA SA est une société de gestion privée et institutionnelle. DECALIA s’est déve­loppée rapidement, notamment grâce à l’expérience de gestion active acquise par ses fondateurs au cours des 30 dernières années. Sa philosophie d’investissement repose sur plusieurs principes fondamentaux : une gestion du risque rigoureuse, la préservation du capital et la sélection des meilleurs talents.

Juste avant Noël, une journée particulière niveau météo m'a permis de me dégourdir les plumes ! Parce que oui, mon sport avant tout, c'est de voler !
Arrive les vacances de Noël, pendant lesquelles j'ai décidé de travailler avec mes clients les plus fidèles. L'année 2020 se termine avec les mêmes statistiques en terme d'entrainement qu'en novembre. Mon corps tient bien le choc !

Janvier:
On repart pour un mois de ski de randonnée. Les entrainements varient avec des périodes de plus en plus longues à haute intensité. Globalement je suis satisfaite de ma forme. Forcément, j'en bave certaines fois, mais je suis tellement focalisée sur l'objectif final que j'accepte de me faire du mal, à pousser la machine. Des fois les gens que je croise en montant sur les pistes doivent se dire que j'ai un grain, à souffler comme une otarie en poussant sur mes bâtons !
Il y a aussi en plus du travail d'endurance, les 2 séances hebdomadaires de renforcement musculaire, gainage principalement. Je crois que c'est la partie de l'entrainement qui demande le plus de détermination tellement je n'aime pas ça.

Je re-signe un partenariat avec Phida Groupe (anciennement G.Dentan, partenaire depuis 5 ans déjà). Phida est une entreprise de construction spécialisée dans l'étanchéité, basée à Lausanne (https://www.dentan.ch).
Janvier se termine également avec les mêmes statistiques d'entrainement, 30'000 de dénivelé positif et une grosse motiv' !

Février:
J'ai à nouveau choisi de travailler durant les vacances scolaires de février, cumuler travail et entraînement à été difficile à gérer. Partir le matin avec les skis de piste, revenir vite fait pour manger à midi, repartir l'après-midi, rentrer et résister à l'appel du canapé, se changer et mettre les chaussures de ski de rando pour aller manger du dénivelé, c'est plutôt intense ! Mais la motivation était bien là et j'ai été gratifiée par de magnifiques couchers de soleil (quand je gagnais la course avec le soleil !) ! 28 activités en 28 jours, pour 32'000m de dénivelé positif. Une bonne gastro en prime lors de l'anniversaire surprise que ma famille avait comploté une semaine à l'avance. Ça a été un gros coup dur car en 3 jours de maladie, j'ai bien cru que j'avais perdu tout le travail fait en 3 mois. Heureusement tout est rentré dans l'ordre après une semaine (rythmée de balades de grand-mère) et j'ai pu manger du dessert le jour de mon anniversaire (le vrai) !
J'ai aussi pu ressortir mon parapente, pour des petits vol fun autour de Verbier. Qu'est ce que j'aime le parapente! C'est à chaque fois une belle évasion, j'aime le changement perpétuel du paysage, selon où on se trouve et ce point de vue unique !

J'ai aussi attaqué des sorties vraiment montagne, avec un Grand Chavalard et une descente à ski de la face Est épique, puis un Mont Dolent (3820m) avec le coach (descente vachement moins épique) et enfin un itinéraire bien sympathique au départ de Bourg-Saint-Pierre avec une arrivée à Fionnay en passant par le Combin de Corbassière (descente abominable !)